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la méthode concrète

partit de sa maison qui était élégante et confortable, ayant dépouillé tout ce qui en elle attestait — par la toilette et les dehors — la femme du monde, la femme qui, dans tout salon où elle fût entrée, se fût trouvée des premières par l’intelligence et la beauté ; elle voulut être aussi pauvre que celles qui allaient être ses compagnes ; elle ne se réserva aucun viatique, ne compta que sur son travail manuel, coupa les ponts derrière elle, et du haut de son âme sereine elle se précipita et plongea dans le peuple. Cela était sans précédent, mais ne devait point demeurer sans influence.

Sans se soucier ni de la finesse perdue de ses mains, ni de la fatigue infligée à ses membres las, ni de la tension nerveuse après les douze ou treize pleines heures de travail, ni de l’inquiétude aux métiers nouveaux, ni des contacts odieux, ni des pensions puantes, ni des couchers à trois ou quatre dans la même chambre entre des couvertures raidies par les sueurs des pensionnaires passées, elle vint, simplement vêtue comme la plus pauvre, se ranger parmi les ouvrières : elle prit le travail d’où qu’il vînt, fût-il le plus dur, et presque cherchant le plus dur, afin de s’instruire mieux des souffrances et des besoins de ses sœurs,