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pris contact avec les ouvriers qu’il voulait étudier ; néanmoins, entre l’ouvrier et lui, restait encore la barrière d’un comptoir. Il convenait d’aller plus loin et d’établir, entre le salarié et l’observateur, un contact immédiat et permanent : l’observateur pourrait ainsi étudier le salarié à tous les moments de son existence, et, salarié lui-même, poursuivre jusque sur soi l’étude de l’influence du milieu où les salariés doivent vivre ; il s’attacherait à décrire, analyser et réfléchir les phénomènes sociaux qu’il aurait vécus. Cette méthode essentiellement concrète supprimait tout intermédiaire déformateur entre l’observateur et la chose observée et substituait à l’étude abstraite des faits l’étude vivante de phénomènes vivants. Je résolus donc d’essayer de me confondre avec les ouvriers en vivant et travaillant comme eux, de tenter de devenir l’un d’eux et d’être l’ouvrier qui se raconte ; je me proposai de noter les conversations, les habitudes, les plaisirs, les opinions, les ressources, les besoins, les tristesses de mes camarades de travail, de décrire leur atelier, leur logement, le cadre de leur existence, de retracer, en même temps que ce milieu réel, les individus réels que je verrais s’y mouvoir ; m’efforçant de conserver aux faits leur couleur et leur mouvement, je parviendrais peut-être