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DEUX MOIS SUR LE GREAT-TRUNK-ROAD.

éléphant richement caparaçonné, entouré d’une vingtaine de serviteurs déguenillés armés de longs fusils, de sabres et de boucliers. Ou bien encore c’est un palanquin mystérieux et doré gardé par des eunuques le cimeterre au vent, et devant lequel la foule s’écarte avec respect. Voilà pour le spectacle de la rue. Quant aux mœurs des habitants, du haut de votre monture vous marchez au niveau du premier et seul étage des maisons, et il vous est facile, sans assistance de diable boiteux, de pénétrer au plus intime des pauvres ménages qui les habitent, pauvres ménages en vérité, dont des lits de sangle et quelques pots de cuivre composent tout le mobilier ! Mais ce qui donne un cachet particulier aux rues de Lucknow, ce sont les noires beautés, ornées de leurs plus beaux atours, qui se pressent à chaque balcon, je pourrais dire à chaque fenêtre, et dont le plus chaste ne saurait méconnaître les philanthropiques intentions ; puis surtout des traits efféminés, de longues chevelures, des yeux qui voudraient être provoquants, et qui servent d’enseigne à un crime dont le nom ne s’écrit pas en Europe, et qui s’étale en plein soleil dans cette Sodome indienne.

On ne saurait quitter Lucknow sans visiter le palais de Constancia, construit par le général Martin, un de ces heureux aventuriers qui vinrent dans l’Inde lorsque le fameux arbre aux roupies portait encore toutes ses feuilles, — feuilles dont il sut récolter une abondante moisson. Quelques mots d’abord de cet heureux soldat de fortune. Le général Martin, fils d’un ouvrier, naquit