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LES ANGLAIS ET L’INDE.

l’odeur infecte du lieu, le tintamarre infernal qui éclate à mes oreilles, m’engagent à ne pas prolonger mon séjour en cet antre, et je me dirige vers la rue, accompagné d’un sage brahmine, cordon sacré en sautoir, chevelure rasée, sauf une mèche, nez et ventre également proéminents, qui me passe autour du col un collier de fleurs sacrées. Des amis bienveillants m’avaient heureusement mis en garde contre ce véritable présent des Grecs. Une quinzaine auparavant, deux jeunes gens peu curieux de se promener par les rues, revêtus des insignes d’une victime expiatoire, avaient jeté par mégarde les colliers offerts au col d’un enfant de basse caste, et cette prostitution des fleurs sacrées exaspéra tellement la populace que les visiteurs eurent beaucoup de peine à se soustraire à une véritable lapidation. Je mets donc prudemment les fleurs dans ma poche, quitte à m’en débarrasser plus tard. Un backchich me délivre de la compagnie du sage brahmine, et je peux me diriger, en toute sécurité, vers le domicile du fabricant dont les admirables broderies et les riches brocarts ont eu tant de succès à l’exposition de Paris. Les magasins, il faut l’avouer, ne payent pas d’apparence. Un escalier aussi roide qu’étroit conduit le visiteur dans une chambre basse dont les murs, peints à la chaux, ne présentent d’autres ornements qu’un portrait lithographié de sa majesté la reine Victoria et un brevet de médaille d’argent de l’exposition de Londres signé par le prince Albert. Un drap blanc étendu sur le sol et deux chaises composent tout l’ameublement de cette chambre, où