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LES ANGLAIS ET L’INDE.

prêté, et que le voyageur expérimenté doit bénir l’asile au toit de chaume où des punkahs et des tatties (nattes en herbes odorantes) viennent le défendre contre Fardeur du soleil et des vents chauds. Les sites pittoresques et les souvenirs historiques qu’il rencontre sur la route ne compensent pas, il faut l’avouer, l’ennui de ces longues journées de solitude. Peu accidentée jusqu’à Bénarès, la voie macadamisée s’étend à travers une longue suite de plaines uniformes dont les collines du Rajmahal interrompent à peine la monotonie. Quant aux monuments, aux ruines, nulle contrée au monde n’en est plus dépourvue. Des huttes primitives de bambous, des populations cuivrées à moitié nues, s’offrent incessamment aux regards. Il semble que le temps passé n’ait laissé aucune empreinte sur ce sol oublieux et sur ces races plus oublieuses encore, et que sans transition cette terre et ces hommes soient arrivés au xixe siècle comme ils étaient au sixième jour, lorsque le Créateur lança le monde dans l’espace.

La scène change à Bénarès, où le voyageur retrouve dans toute leur gloire cette religion mystérieuse et ces folles superstitions qui comptent encore aujourd’hui plus de deux cents millions d’adeptes. La ville de Bénarès, cette Jérusalem de la religion des brahmes et ce foyer de la science hindoue, est bâtie, comme chacun sait, sur la pointe du trident de Shiva, au contraire de tous les autres points de notre globe sublunaire, qui reposent sur les dix mille têtes du serpent Ananta, et par ce seul fait elle se trouve protégée contre les tremblements de