Page:Valbezen - Les Anglais et l’Inde, 1857.djvu/336

Cette page n’a pas encore été corrigée
326
LES ANGLAIS ET L’INDE.

comme il me l’avoua le lendemain, et non sans rougir !

Cette déplorable aventure démontre assez que le plus modeste bachelier ne peut entretenir dans l’Inde moins d’une douzaine de domestiques : rusés coquins qui ne comprennent pas ou plutôt ne veulent pas comprendre un seul mot des langues de l’Europe, ne savent pour la plupart ni le nom d’une rue, ni le nom même de leur maître, et sont de plus doués du zèle le plus fougueux et le moins réfléchi ; socialistes d’ailleurs d’un pourpre foncé, avec des apparences de soumission et de respect au milieu desquelles le pauvre blanc peut, sans exagération, se comparer aux premiers chrétiens livrés aux bêtes. De là des mystifications quotidiennes et lamentables dont le premier venu doit trouver mille exemples dans sa vie privée. Appelez-vous un domestique pour lui donner une lettre à porter ; le papier à peine remis, il est parti pour où ? Dieu le sait, mais assurément ni vous ni lui n’en savez rien. Monté en voiture dans l’intention de rendre une visite, vous avez piloté tant bien que mal votre cochera travers le dédale des rues de la ville, et croyez avoir reconnu la maison amie : le durwan ou portier en turban rouge se dresse près du marchepied de votre équipage ; mais vos tribulations sont loin de toucher à leur terme, car ce portier n’a pas la plus faible idée du nom de son maître. Judge sahib, collector sahib, captain sahib, bibi sahib ou miss baba, suivant la position sociale ou le sexe de l’hôte de la demeure, son intelligence ne va pas au delà ! Aussi