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LES FONCTIONNAIRES CIVILS

haine de la fraude et du mensonge, cette susceptibilité morale, sans lesquels il n’est point d’homme vraiment supérieur dans la société européenne. Aussi, en examinant les actes de leur vie, lorsqu’on en trouve qu’une morale même facile ne peut s’empêcher de réprouver, il faut penser non-seulement au succès, qui justifie bien des choses, mais encore au milieu corrompu et corrupteur danslequel ils avaient vécu dès leur plus tendre jeunesse.

Lorsque le marquis de Cornwallis arriva dans l’Inde, la compagnie n’était plus seulement une association de marchands, et d’autres intérêts que ceux des transactions commerciales devaient préoccuper ses représentants immédiats. En trente ans, les victoires de Clive et de Hastings avaient donné à l’Angleterre dans l’est un empire qui, pour la richesse et l’étendue, ne le cédait en rien aux conquêtes de Cortez et de Pizarre. Il ne s’agissait plus pour les agents civils de la compagnie d’auner du drap, de peser du salpêtre, mais bien de remplir les fonctions les plus ardues qui puissent échoir à l’homme public. Rendre justice à des millions d’hommes différents entre eux de manières et de langage, administrer un système de revenu compliqué dans des districts grands comme des royaumes d’Europe, maintenir l’ordre et l’empire des lois au milieu d’une population corrompue, être à la fois juge, administrateur, financier, diplomate, souvent même soldat, tels étaient les devoirs multiples que les officiers civils de la compagnie avaient à remplir, et de leur intégrité, de leur aptitude, de leur dévouement allait dépendre la fortune de l’Angleterre