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CRIMES ET CHÂTIMENTS

l’un de ces derniers me remet au passage un plan de Sébastopol qui vient de sortir à l’instant de dessous la pierre. Dans tous ces ateliers règne un silence profond ; l’attitude des détenus est pleine de soumission, et en effet les hommes indisciplinés sont employés à des travaux pénibles : on les occupe aux moulins à blé, à huile, surtout aux pilons qui préparent la filasse pour la fabrication du papier. Chaque bras de levier est armé à son extrémité d’une douzaine de travailleurs, qui, un pied sur un talus, impriment de l’autre un mouvement de va-et-vient à la machine. Ces groupes de corps noirs et nus, ruisselant de sueur, ces figures au regard haineux, à la chevelure inculte, suspendues entre ciel et terre, ont un aspect diabolique qui me rappelle à la mémoire certains détails de la grande œuvre de Michel-Ange. On fera remarquer toutefois que ces travaux pénibles, surlout sous le ciel brûlant de l’Inde, sont beaucoup moins redoutés des détenus que l’emprisonnement cellulaire, qui, dans l’établissement pénitentiaire d’Agra, sert à réprimer les infractions graves à la discipline. Les cellules sont réunies dans un bâtiment spécial. A la porte de chaque cellule, une notice donne en langue native le nom, la nature du méfait, la durée de la peine, et, détail marqué au triple sceau de l’excentricité britannique, le poids du prisonnier à son entrée en cellule. Des moyennes, prises sur des expériences multipliées, permettent, dit-on, d’établir que le régime cellulaire est infiniment favorable aux détenus, et qu’il leur communique un embonpoint comparable à celui