Page:Valbezen - Les Anglais et l’Inde, 1857.djvu/196

Cette page n’a pas encore été corrigée
186
LES ANGLAIS ET L’INDE

quer désormais la coutume du suttee dans leur famille, condition qui fut acceptée par ces derniers. Aussitôt que la veuve eut reçu avis de la décision de l’autorité, elle témoigna de sa joie par ses gestes et ses paroles ; puis, sans perdre de temps, accomplit par trois fois la cérémonie du bain, pendant qu’à une distance de cent cinquante pas environ l’on rassemblait les matériaux du nouveau bûcher. Après le bain, elle demanda une feuille de bétel, puis se dirigea vers le lieu du supplice en s’appuyant sur les épaules de son fils et de son neveu. Au moment de son départ, le feu avait été mis à la pile de matériaux combustibles et la flamme menaçante brilla bientôt aux yeux de la veuve ; mais la fierté de sa démarche et la sérénité de ses traits ne subirent pas la plus légère altération. Une seule fois dans le trajet elle s’arrêta pour murmurer ces mots : « Mon époux, pource quoi pendant cinq jours m’ont-ils retenue loin de toi ! » À dix pas du bûcher elle quitta ses deux guides, et, s’avançant seule, fit d’un pas majestueux le tour de l’ardente fournaise. Puis elle s’arrêta un instant, jeta les fleurs de son collier dans le feu, récita une prière, et avec un sang-froid qui ne se démentit pas un seul instant vint se coucher sur le dos au milieu des flammes, où elle fut dévorée sans qu’un cri, une plainte sortît de sa bouche. Du mardi au samedi, elle n’avait pris d’autre nourriture que quelques feuilles de bétel.

Avec l’association des thugs, le gouvernement anglais n’a pas eu à prendre des mesures moins énergiques que vis-à-vis des veuves indiennes qui s’imposaient le suttee,