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LES ANGLAIS ET L’INDE

à ces fêtes industrielles : ce produit, c’est le cipaye. Avoir donné à un Indien l’apparence d’un soldat européen, c’est là une œuvre d’admirable patience que peut seul apprécier celui qui, dans un contact de chaque jour, a reconnu les abîmes de préjugés infranchissables qui séparent la race indienne de nous, de nos habitudes, celui qui a compris par expérience qu’il est dans l’Inde une chose plus fâcheuse que son soleil de plomb fondu, ses moustiques dévorants, ses fièvres empestées, — les domestiques natifs.

L’éducation militaire du cipaye demande environ neuf mois ; au bout de ce temps, la métamorphose est complète, la chenille est devenue papillon ! L’on peut presque dire que la tenue du cipaye ne laisse rien à désirer ; seulement on s’aperçoit aisément, à une certaine gêne dans la démarche, qu’il n’est pas habitué à porter le soulier ; l’habillement est le même, à très-peu de chose près toutefois, que celui des troupes royales ; au lieu d’un col de cuir, le cipaye porte un col formé de grains de verroterie blanche ; il y a aussi quelque différence dans les boutons et la plaque de buffleteries ; de plus, le shako est remplacé par un bonnet rond de laine. En somme, la tenue extérieure du cipaye laisse bien peu de chose à désirer ; mais il lui manque, on le devine au premier coup d’œil, le sentiment de la dignité de l’habit qu’il porte. Rien dans sa contenance ne rappelle l’air martial de nos pantalons rouges, ou la tournure d’homme, carrée par la base, du soldat andais. L’humilité, l’esprit de servitude de la race in-