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phrases exclusivement découpées dans les œuvres, les lettres, les journaux et notes de Dominique.

Ses soupçons, ses mépris ne se bornent pas à noter de charlatanisme toute la politique et presque toute la littérature de son temps. Les savants quelquefois ne sont pas épargnés. Il conte, je ne sais où, l’histoire vraisemblable de deux compères érudits. Ces hommes habiles conviennent de répandre qu’ils connaissent quelqu’une de ces langues impénétrables qu’il est plus aisé d’enseigner que d’entendre, étrusque ou mexicain préhistorique. Le pouvoir, trop heureux de paraître honorer les Sciences et favoriser des talents qui ne lui donnent nul souci, les comble de rubans, de pensions et de chaires.

Beyle avait gardé toutefois une révérence assez remarquable aux mathématiques. Il avait quelque peu préparé Polytechnique et apprécié les beautés de l’équation du second degré. Il avait espéré que son algèbre le tirerait de Grenoble. Il s’en tira par d’autres moyens ; mais, de sa brève préparation, il retint la précieuse et redoutable habitude d’esprit qui consiste à tenir pour identiquement nulles les « choses vagues » et du reste toutes les valeurs indémontrables qui habitent les esprits.

Je note, en passant, que l’illustre Lagrange est peut-être le seul de ses contemporains dont il ne parle jamais que dans les termes les plus respectueux.