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et très heureuse liaison avec le maréchal Foch. L’extrême sud, l’extrême nord de la France ont confondu leurs natures et leurs différentes vertus pour le service et le salut de la nation une et indivisible, pour la réunion au corps national des Français qui en avaient été séparés.

Hélas, il faut bien confesser que tous les buts de guerre n’ont pas été atteints.

L’espoir essentiel de voir s’épanouir l’état de contrainte anxieuse qui pesait sur l’Europe depuis tant d’années n’a pas été rempli. Mais peut-être ne faut-il pas demander à la guerre, — ni même à la politique, — de pouvoir jamais instaurer une véritable paix ?

Le ciel, treize ans après, est fort loin d’être pur ; et le monde, Monsieur, ne se hâte point de vous accorder le loisir que vous avez magnifiquement mérité. La France, à grand regret, ne peut point vous laisser cultiver à votre aise vos fleurs ni votre vigne, qui sont au pied des Alpes, un peu au-dessus de la mer. Elle entend cultiver en paix ses campagnes, aux dépens de la vôtre. Vous inspectez et inspirez constamment son armée ; vous visitez ses troupes, vous redressez les uns, vous animez les autres ; vous veillez aux travaux de sa défense : vous avez parcouru toute la ligne de sa frontière, en compagnie du disciple le plus cher et de l’ami le plus ardent du maréchal Foch, et vous avez étudié de vos yeux tous les points de cette ligne sacrée.

Il le faut bien. Les uns nous trouvent trop d’or ; les autres, trop de canons ; les autres, trop de territoires ; et nous voici provocateurs de l’univers, non, certes, par la parole, moins encore par l’intention ; mais pour être ce que nous sommes, et pour avoir ce que nous avons.