Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 3, 1933.djvu/95

Cette page n’a pas encore été corrigée

Nous étions non éloignées,
Mais secrètes araignées
Dans les ténèbres de toi !

Ne seras-tu pas de joie
Ivre ! à voir de l’ombre issus
Cent mille soleils de soie
Sur tes énigmes tissus ?
Regarde ce que nous fîmes :
Nous avons sur tes abîmes
Tendu nos fils primitifs,
Et pris la nature nue
Dans une trame ténue
De tremblants préparatifs…

Leur toile spirituelle,
Je la brise, et vais cherchant
Dans ma forêt sensuelle
Les oracles de mon chant.
Être ! Universelle oreille !
Toute l’âme s’appareille
À l'extrême du désir...
Elle s’écoute qui tremble
Et parfois ma lèvre semble
Son frémissement saisir.