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Ose l’abîme !.. Passe un dernier pont de roses !

Je t’approche, péril ! Orgueil plus irrité !

Ces fourmis sont à moi ! Ces villes sont mes choses, Ces chemins sont les traits de mon autorité !

C’est une vaste peau fauve que mon royaume !

J’ai tué le lion qui portait cette peau ;

Mais encor le fumet du féroce fantôme

Flotte chargé de mort, et garde mon troupeau !

Enfin, j’offre au soleil le secret de mes charmes ! Jamais il n’a doré de seuil si gracieux !

De ma fragilité je goûte les alarmes

Entre le double appel de la terre et des cieux.

Repas de ma puissance, intelligible orgie, Quel parvis vaporeux de toits et de forêts Place aux pieds de la pure et divine vigie, Ce calme éloignement d’événements secrets !

L’âme enfin sur ce faîte a trouvé ses demeures !

O de quelle grandeur, elle tient sa grandeur Quand mon cœur soulevé d’ailes intérieures Ouvre au ciel en moi-même une autre profondeur !