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— O Conseil !.. Station solennelle !.. Balance
D’un doigt doré pesant les motifs du silence !
O sagesse sensible entre les dieux ardents !
— De l’espace trop beau, préserve-moi, balustre !
Là, m’appelle la mer !.. Là, se penche l’illustre
Vénus Vertigineuse avec ses bras fondants !



Mon œil, quoiqu’il s’attache au sort souple des ondes
Et boive comme en songe à l’éternel verseau,
Garde une chambre fixe et capable des mondes ;
Et ma cupidité des surprises profondes
Voit à peine au travers du transparent berceau
Cette femme d’écume et d’algue et d’or que roule
Sur le sable et le sel la meule de la houle.



Pourtant je place aux cieux les ébats d’un esprit ;
Je vois dans leurs vapeurs des terres inconnues,
Des déesses de fleurs feindre d’être des nues,
Des puissances d’orage errer à demi nues,
Et sur les roches d’air du soir qui s’assombrit,
Telle divinité s’accoude. Un ange nage.
Il restaure l’espace à chaque tour de rein.
Moi, qui jette ici-bas l’ombre d’un personnage,