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ORIENT ET OCCIDENT

PRÉFACE AU LIVRE D’UN CHINOIS[1]

Rares sont les livres délicieux ; et rares les livres de véritable importance. On ne voit donc presque jamais la combinaison de ces valeurs. Cependant, l’improbable n’est pas l’impossible ; il peut arriver une fois qu’une œuvre charmante soit le signe d’une époque du monde.

Je trouve dans celle-ci, sous les couleurs les plus douces et les apparences les plus gracieuses, les prémices de grandes et d’admirables nouveautés. Elle me fait songer à l’aurore, au phénomène rose qui, par ses tendres nuances, insinue et annonce l’immense événement de la naissance d’un jour.

Quoi de plus neuf et de plus capable de conséquences profondes, que l’entreprise d’une correspondance toute directe entre les esprits de l’Europe et ceux de l’Extrême-Asie, et même entre les cœurs ? Ce commerce des sentiments et des pensées

  1. Ma mère, par Cheng Tcheng.