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donné, subit et supporte l’autre, qui est l’acte des besoins et des désirs de l’homme.

Socrate

J’ai cru cela. L’homme n’a pas besoin de toute la nature, mais seulement d’une partie d’elle. Philosophe est celui qui se fait une idée plus étendue, et veut avoir besoin de tout. Mais l’homme qui ne veut que vivre, n’a besoin ni du fer ni de l’airain « en eux-mêmes » ; mais seulement de telle dureté ou de telle ductilité. Il est contraint de les prendre où elles se trouvent, c’est-à-dire dans un métal qui a aussi d’autres qualités indifférentes… Il ne regarde que son but. S’il veut enfoncer un clou, il le frappe avec une pierre, ou avec un marteau qui est de fer, ou de bronze, ou même de bois très dur ; et il l’enfonce à petits coups, ou d’un seul plus énergique, ou parfois par une pression ; qu’importe à lui ? Le résultat est le même, le clou est enfoncé. Mais si l’on ne regarde pas à suivre le fil de cette action, et qu’on envisage toutes les circonstances, ces opérations paraissent entièrement différentes, et des phénomènes incomparables entre eux.