général Thomas, détesté dans ces bataillons de Montmartre et de Belleville, à cause de sa juste sévérité pendant le siège, cette arrivée nous a tous perdus : la foule, bête furieuse et déchaînée, veut du sang. Celui de Clément Thomas coule le premier ; on le saisit au collet, malgré la résistance du lieutenant Meyer, et de quelques autres citoyens courageux qui retombent épuisés, pendant que nous autres, toujours gardés à vue et couchés en joue à chaque instant, nous ne pouvons bouger.
“ Le vieux capitaine décoré de juillet est un des plus ardents à invectiver le malheureux général, qui disparaît à nos yeux, est entraîné à quelques pas de là et fusillé par dix à douze coups qui répondent lugubrement dans nos cœurs. Ce ne fut pas un feu de peloton, mais des coups isolés tirés l’un après l’autre comme dans un feu de tirailleurs.
“ Le malheureux général Lecomte subit quelques instants après le même sort, de la même manière. Il était cinq heures et demie.
“ Puis, c’était notre tour. Nous étions préparés à la mort, et chacun de nous s’attendait à ouvrir la marche funèbre. Mais nos défenseurs de la garde nationale, après une demi-heure de suprême effort, parvinrent en partie à apaiser la foule, qui s’était éclaircie après le meurtre des deux généraux, et obtinrent d’elle de nous ramener à notre prison du Château-Rouge, où nous serions encore une fois mis à la disposition du comité.