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gardes nationaux qu’ils rencontrèrent. Une fois l’œuvre de sang accomplie, le bâtiment de la municipalité présentait un spectacle inouï. Dans une seule salle du rez-de-chaussée il y avait soixante-quinze cadavres affreusement mutilés. Ceux qui ont vu des villes prises d’assaut, et qui connaissent par expérience les horreurs de la guerre, n’imagineront jamais spectacle plus sanglant et plus épouvantablement désordonné que celui qu’offrait la municipalité du 11me arrondissement. Ce mélange de sang, de boue, de cadavres, d’armes, d’effets d’équipement, était horrible à voir et donnait le frisson. On aurait dit qu’une troupe de jaguars, de tigres, de hyènes, ou de chacals était passée par là, et qu’elle y avait assouvi tous ses instincts féroces, sa soif de sang et de carnage. On ne pouvait pas croire en contemplant ce charnier que c’étaient des hommes, des concitoyens qui s’étaient rendus coupables de ces égorgements sans nom et sans exemple ; et pourtant c’était bien là l’œuvre des égorgeurs versaillais.

Il ne restait plus alors dans tout Paris qu’un petit coin de terre compris entre les portes de Bagnolet et des Prés Saint-Gervais, qui n’était pas au pouvoir des envahisseurs. Quelques mille gardes nationaux et quelques pièces de canons défendaient cette faible partie des remparts, sur laquelle flottait encore le drapeau rouge de la Commune de Paris, criblé de balles et d’éclats d’obus.