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J’ai été le condisciple d’Hippolyte Royer-Collard ; c’était, dès ses premières études, un caractère et une intelligence d’une puissante originalité ; il se fit écrivain de la meilleure école, à force d’étudier tous les maîtres du dix-septième siècle ; pour le style, comme pour la science, il puisait aux sources. D’une mémoire infatigable, il était dans ses écrits, comme dans ses improvisations, d’une prodigieuse fécondité d’idées, de vues, d’arguments qui s’enchaînaient et se liaient entre eux ; c’était un esprit prompt et un bon talent ; il jeta un grand éclat dans son concours pour la chaire d’hygiène. La calomnie s’en mêla, et prétendit qu’Hippolyte Royer-Collard n’avait pu achever sa composition par écrit dans le temps voulu. La vérité triompha, et la Faculté de médecine compta dans ses rangs un jeune et digne successeur de Hallé, à qui pourtant il ne ressemblait guère, ni par la vie intime, ni même par ses qualités d’esprit.

Membre de l’Académie de médecine, Royer-Collard y soutint plus d’une importante discussion ; il éclaira, il charma souvent l’assemblée par des lectures pleines de faits, de nouveauté et d’une haute dialectique.

C’était un caractère qui avait sa veine à lui ; c’était le plus curieux chercheur de toutes les folies humaines ; il allait sans cesse à la découverte ; il se plaisait à prendre sur le fait les bizarreries, les vertiges et tous les vices de jour et de nuit de l’humanité.

Hippolyte Royer-Collard avait un fonds inépuisable d’obligeance ; il avait l’âme fière autant que l’esprit élevé ; son désintéressement était sans bornes ; indulgent pour tous, il ne comprenait que de chaudes et fidèles amitiés. Les femmes tenaient surtout une grande place