tre, que j’appellerai sœur Marguerite, était de la beauté la plus rare et la plus distinguée. Les austérités du couvent avaient dû la dépouiller de sa chevelure, mais n’avaient pu faire disparaître les sourcils noirs les mieux dessinés et les plus arqués, sous lesquels brillaient des yeux d’un iris bleu clair, protégés aussi par de longs cils noirs. La naissance, les lignes et les ailes très-mobiles du nez étaient pures et gracieuses ; ses lèvres, qui rappelaient le corail, se relevaient par de doux mouvements et donnaient souvent à sa physionomie une expression de gaieté douce et de bienveillants sourires. L’éclat du teint de cette jeune religieuse (elle avait à peine vingt-deux ans) et la blancheur de sa coiffe produisaient des jeux de lumière et de couleur à charmer la vue. Ses dents, qui ne se montraient pas, mais qui se laissaient voir, avaient le ton et l’éclat que donne la santé. On surprenait et on admirait sur cette figure, d’un ovale charmant, trois choses qui d’ordinaire ne vont guère de compagnie : la beauté, l’esprit et la vertu. Entre le bord inférieur de la coiffe et le bout de l’épaule, on remarquait une distance qui donnait de la dignité et de l’élégance aux mouvements de tête. Toute sa personne était harmonieuse. La voix douce et timbrée de sœur Marguerite parlait peut-être plus encore au cœur qu’à l’oreille.
Dans ces entraînements de jeunesse qui respectent peu les convenances, je n’adressais jamais la parole à la sœur Cunégonde, et je ne me lassais pas de prolonger le plus possible, avec sœur Marguerite, des causeries qui ne pouvaient cependant avoir d’intérêt que par des inflexions de voix discrètes, et par des regards aussi