nouvelle, et Coupigny de pousser des gémissements, de bondir sur sa chaise en levant les yeux au ciel ! Voici un épinard pyramidal ! Monsieur Arnault, faites donc couler pour nous le miel de vos vers ! Voilà la langue rajeunie qu’on doit parler, disait M. Romieu à Coupigny. Arnault, quoique classique, se prêtait à cette comédie et à cette trahison apparente. Cette complicité avouée contre la langue de Racine mettait le comble au désespoir et à l’indignation de Coupigny. Il n’en perdait cependant pas une bouchée ; il était moins classique que gourmand.
Ce fut ce même Coupigny qui nous disait un premier jour de l’an ; « Voilà vingt ans que je dîne deux ou trois fois par semaine chez mademoiselle Mars, et elle ne m’a jamais rien donné. »
Dans l’intimité, comme au théâtre, mademoiselle Mars était simple, naturelle, d’une gaieté tranquille et aimable ; elle faisait preuve dans ses manières, dans son langage et dans sa conduite, d’une rare pénétration et de toutes les délicatesses d’une femme bien élevée ; elle ne cherchait ni les mots ni les effets d’esprit ; elle pensait et parlait avec tact et bon sens. Voici un de ses aperçus sur l’art du comédien : « Comme nous jouerions mieux la comédie, me disait-elle, si nous tenions moins à être applaudis ! »
Mademoiselle Mars aimait à conter ; elle contait avec agrément. Comme comédienne, elle avait du singulier, elle ne mentait pas.
Mœurs de théâtre assez étranges ! mademoiselle Mars se respectait ; elle prit toujours l’amour très au sérieux, et dans les tendres et durables intimités qui firent évé-