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VÉNUS EN RUT

J’apprendrai surtout à mes sœurs, qui ne voyagent que dans leur boudoir, que les portes St-Michel, St-Roch et d’Imbert sont unies par des allées superbes, où la haute, moyenne et basse noblesse promènent leur fatuité dans des chars élégants, honorant de leur poussière le pédestre tiers-état. C’est à une de ces promenades charmantes que je fus raccrochée par l’abbé Succarino, joli diacre, qui ne pouvait que grassayer, et qui, pour douze bénéfices, n’aurait pas franchement prononcé un R.

— Madame, me dit-il en m’abordant, est étranzère ; ze serais trop heureux si ze pouvais ésanzer les beautés de cette ville contre une des siennes.

— Monsieur est Italien, car il fait des concetti ; les habitants des bords du Tibre sont galants ; je ne mérite de préférence que par l’envie que j’ai de me rendre agréable dans les villes que je parcours.

— Vous devez être satisfaite, madame ; certainement vous triompherez partout ; ze pourrais répondre de quelques zens ici, qui connaîtraient ce que vous valez, mais pas comme de moi-même, etc., etc.

Conversation en règle, attaque, résistance, offres de services, remercîments, voilà ce qui occupa la promenade, terminée par la permission de me reconduire et de manger un poulet