Page:Vénus en rut, 1880.djvu/57

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
48
VÉNUS EN RUT


de l’endormir ; je lui prodiguai les caresses que je savais lui plaire ; il se distingua pour les payer, et je ne le vis dans les bras d’un sommeil, si longtemps attendu, qu’après avoir reçu deux fois la preuve de sa trop sensible amitié. Quand je le vis totalement assoupi, je me glissai, sans qu’il pût se réveiller, et le laissai ronfler à son aise.

Il faut que je t’avoue encore un de mes talents, celui de plonger dans une sorte de léthargie ceux de qui je veux me délivrer, pour aller ailleurs, et de les quitter sans qu’ils s’en aperçoivent : je me suis procuré, cent fois, par cette manœuvre hardie, des jouissances nocturnes.

Francour, se reposant sur ses lauriers, je courus en cueillir de nouveaux ; la Molinière m’attendait.

— Enfin, vous me tenez parole, me dit-il, tendre Rosine, les moments qui nous restent seront bientôt écoulés ; vous m’avez promis une faveur, je la sollicite à vos genoux.

— Non, vous n’aurez point à vous plaindre.

Je vis que la rusée Fanchette avait mis des draps blancs, qu’elle avait allumé quatre bougies, et que, sur une table, elle avait servi des biscuits, des confitures sèches et du vin. Nous étions en été ; je n’avais qu’un léger corset, il disparut : je m’élançai dans le lit ; mon amant, aussi dépouillé que moi, s’y trouva en même temps.