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VÉNUS EN RUT


ma gentillesse, je lui sautai au cou, et l’engageai à éteindre l’incendie qui venait d’être allumé ; volupté dont ma dupe me tint compte et dont je fis mon profit ; car, en bonne arithmétique, deux valent mieux qu’un. Ce que je te raconte te prouve que les amants, comme les maris, doivent se méfier des caresses affectées de leurs maîtresses. Les hommes le savent ; cependant je n’ai jamais manqué de les prendre dans ce piège usé, parce que, dans mes mains, il devient dangereux : nulle femme n’a porté plus loin que moi ce patelinage séduisant qui captive le cœur et les sens.

La ville où j’étais avait un spectacle ; je les suivais tous ; le théâtre est, pour une femme ardente, d’une ressource singulière ; c’est dans une salle d’opéra qu’elle jette le mouchoir ou le reçoit : là les lumières augmentent sa beauté, la parure lui donne de l’éclat ; les yeux se promènent sur un sérail masculin ; les ariettes amoureuses échauffent l’imagination ; les ballets, souvent très libertins, excitent les désirs par une pantomime lascive ; tout y respire la licence, et une courtisane se dit, avec orgueil… je puis me donner ce qui me plaît ; depuis le seigneur, couché négligemment au balcon, jusqu’au coiffeur perché dans les quatrièmes loges ; depuis l’histrion qui joue les rois, jusqu’à son humble confident. Je devrais finir ici mon histoire, car