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VÉNUS EN RUT


années de service il m’eût été impossible de le prononcer.

Pendant un été, toutes nos nuits furent consacrées à ce joli jeu ; mais plus je recevais, plus je voulais thésauriser.

Il fallait battre la retraite aux premiers traits de l’aurore ; mon amant et celui d’Aglaé, qui étaient frères, se retiraient conduits par une soubrette intelligente, qui les introduisait avec le même mystère. On se doute que j’avais le cadet ; vingt ans, vingt degrés de force étaient son partage ; s’il était invincible, je restais invaincue ; après nos ébats si répétés, nous nous jetions, ma camarade et moi, dans les bras de Morphée, qui nous couvrait des pavots de la volupté. Heureuse jeunesse ! à notre lever nous étions fraîches comme la rosée du matin, éclatantes de santé et prêtes à recommencer : cela est si vrai, que, malgré mes travaux nocturnes, je sentais un vide pendant le jour. J’étais une petite pelote de graisse, et je craignais de maigrir faute d’un aliment si nécessaire, car les dieux m’ont accordé un rare privilège ; plus j’ai sacrifié à l’amour, ou, sans périphrase, à mes plaisirs, plus ma santé est devenue robuste, et plus mon corps a pris de développement.

Il fallait tromper mon très honoré papa sous la tutelle de qui j’étais encore, mais c’était l’excellent ; se moquer de qui se croit supérieur