ment foutue ; un vent frais ayant produit un
léger courant, nous fûmes portés à quelques
lieues de notre point de départ ; il se calma,
alors de l’Aigle mit en usage ses moyens de
direction, et, après un second essai voluptueux,
nous nous arrêtâmes sur une pelouse qui est
en face du château de Rosemonde, et nous descendîmes
lentement, au milieu d’une foule de
spectateurs, qui nous comblèrent d’éloges. Je
crois qu’ils soupçonnèrent ce qui m’était arrivé ;
le président ne put s’empêcher de me dire :
— Comment vous en trouvez-vous, belle dame ? Avouez que la chose est rare.
Je sus me tirer d’affaire : d’ailleurs nous n’avions ni prudes ni bégueules, et toutes les femmes auraient voulu en avoir fait autant que moi, sans courir les mêmes dangers. De l’Aigle m’a priée souvent de tenter de nouveaux voyages ; moi je l’ai prié d’en faire dans mon boudoir ; ma curiosité était satisfaite, ce sont des tours de force qu’il ne faut pas recommencer.
Je revins à Paris, l’aventure du chevalier de Mercœur et de Joséphine avait fait du bruit, on me proposa de me charger de l’instruction d’un jeune chevalier de Malte qui devait partir incessamment pour ses caravanes et qui n’avait jamais vu que les fossés, les créneaux, les ponts du château de ses pères et quelques femmes de chambre ou paysannes agrestes.