Page:Vénus en rut, 1880.djvu/184

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
175
VÉNUS EN RUT


de chambre, et l’or du bourgmestre, employé avec art, me faisait espérer de détourner, non seulement les métaux des financiers et des magistrats, mais du corps diplomatique, toujours excellent pour une petite maîtresse qui sait, en bonne citoyenne, faire contribuer les nations étrangères.

Mes arrangements préliminaires fixés, il me parut intéressant de me montrer avec l’éclat que ma fraîcheur renouvelée par un repos nécessaire, avait rendue à mes charmes : pour les placer dans un jour favorable, et ce n’est pas celui qu’éclaire le soleil dans son plus brillant apogée, il fut décidé, par mes petites réflexions, de commencer par l’Opéra. J’y fus seule, chargée de diamants, et mise avec une élégance recherchée : ce procédé annonçait aux amateurs mon état et mes vues. Dans un entr’acte, après avoir essuyé la canonnade de cent lorgnettes braquées sur moi, un charmant polisson, le marquis de Florival, entra dans ma loge, un bouquet énorme à la main. Le parfum de ses fleurs me fit tourner la tête ; je regardais ce faisceau avec désir ; le marquis s’en aperçut, et me dit :

— Madame, si j’avais le bonheur de vous être connu, j’oserais vous offrir cette bagatelle ; vous ne la refuseriez peut-être pas.

Tout en parlant, ses regards me pénétraient ; il se disait : « Est-ce elle ? ne l’est-ce pas ? »