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l’immortalité immédiate

par les coups, desséchées par la soif, semblent le condamner. Ne crie-t-il pas : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Et pourtant un misérable crucifié à côté de lui et dont la chair tressaille des mêmes douleurs, adresse à ce malheureux cloué sur un gibet, ce moribond nu, saignant, délaissé, déjà en proie aux affres suprêmes, la requête la plus extravagante : « Seigneur, dit-il à son compagnon d’infamie, souviens-toi de moi quand tu seras entré dans ton règne ! » Jésus mourant ne guérit pas ce pauvre corps que les bourreaux vont achever de briser tout à l’heure ; il ne le désaltère pas, il ne le détache pas de la croix maudite ; il ne lui accorde aucun soulagement matériel ; il ne lui promet pas de résurrection terrestre. Il dit simplement : « Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis. »

Le paradis pour l’imagination israélite, c’est le séjour du bonheur ineffable, le jardin arrosé d’eaux vives où souffle perpétuellement un vent délicieux, le lieu des beaux ombrages aromatiques où le soleil ne brûle plus, où la fatigue et la souffrance sont inconnues, où toutes les blessures se ferment et les élus sont servis par les