Page:Uzanne - Son altesse la femme.djvu/253

Cette page n’a pas encore été corrigée

je pleurai ma Juliette morte d’amour, d’attente ou de mélancolie. Je la pleurai avec cette sensation que donnent l’irrémédiable, la sombre fatalité, le sentiment troublant de ses révoltes ; je la pleurai avec Fidée de la volorfté divine insondable. Larmes douces qui me permettaient de chercher mon amante dans les au delà de la vie, dans les paradis amoureux où les cœurs fervents s’attendent encore et toujours avec la passion de ce qui est éternel ; larmes bienfaisantes qui mettaient dans ma religiosité d’homme un espoir mystique et consolant.

« Je revins à Paris il y a deux mois à peine, non pas consolé, — les grandes douleurs ferment la porte à l’oubli — mais en cet état de blessé moral qui sent sourdre comme une poésie dans l’alanguissement de sa convalescence. Juliette était en moi, elle y vivait saintement. Elle m’envahissait de son souvenir radieux. J’avais juré de n’aimer qu’elle et aucune femme, je l’affirme, n’aurait eu la puissance de faire varier mes sentiments…

« Pourquoi le destin m’a-t-il ouvert les yeux ? pourquoi la mort ne m’a-t-elle point saisi dans la douceur cruelle de mes saines croyances ? pourquoi ne suis-je point dans le néant ou dans l’infini, au lieu de sentir l’infamie qui m’étouffe ? — Juliette, mon pauvre René, Juliette est vivante et déshonorée,

avilie au rang des filles de plaisir…… Je délire…,

mais ne me crois pas fou ! — je l’ai revue il y a huit