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il avait déjà été dénoncé le 16 décembre 1793 par Bourdon de l’Oise comme ex-noble, établissant une correspondance criminelle avec des royalistes et trahissant dans les deux camps. L’histoire nous apprend de quelle manière il se justifia avec grandeur et fit refuser à l’unanimité sa démission de membre du Comité de Salut public ; mais ce que la muse Clio n’enregistre pas, ce sont les petits côtés des grands événements, les raisons occultes qui sont les vrais moteurs de la politique des hommes.

« Hérault de Séchelles invita au Pavillon de l’Amitié ses collègues et ses amis ; cet asile de l’amour, qui aurait dû être inviolable, devint une sorte de club où la politique côtoyait à table le bel esprit et la galanterie. Jacquette Aubert se plia à ce rôle, — que n’eût-elle fait pour son demi-dieu ! — Aimable pour tous, spirituelle, enjouée, elle était la reine de ces petites réunions ; coquette avec réserve, elle imposait le respect aux timides ; mais elle donnait, sans y prendre garde, de l’amour aux forts et aux violents toujours portés à ravager les paisibles retraites et les nids heureux où le plaisir se couve dans la ouate. Saint-Just, le farouche Saint-Just, la vit à l’un de ces dîners et en devint éperdument épris. Beau de visage, de manières distinguées, plein de faconde et de fatuité, ce jeune exalté prétendait que, pour lui, apparaître et vaincre étaient synonymes. Il se trompa, mais il ne se tint point pour battu.