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style enveloppant et chaleureux comme un cordial ; puis ici et là, devant quelques minces plaquettes, ils sourient au souvenir d’analectes fous ou de drôleries saupoudrées d’atticisme.

Jamais ils ne se lassent de cette inspection passée sur le front des troupes de toutes classes, dont ils aiment à apprécier les tomaisons comme des compagnies et les différents styles comme divers régiments. Ici, les encyclopédistes forment la Vieille Garde; là, les conteurs du siècle dernier se groupent comme des Chevau-Légers ; plus loin, les bibliographes miment l’Intendance générale, et les historiens la légendaire Artillerie. Et chaque jour, l’amoureux inspecteur des livres revient s’assurer de la bonne tenue de son petit corps d’armée littéraire ; il prend, selon son humeur, tel ou tel « enrégimenté », le considère, le retourne, l’époussette d’un tour de main, et parfois tombant sur un siège, la cigarette aux lèvres, l’esprit aéré de bien-être, l’âme heureuse, il se laisse aller à questionner au hasard le petit fantassin spirituel qu’il s’est amusé à tirer du rang sans y songer tout d’abord.

Pour celui-ci, la journée passe vite, il vit pour et par ses livres ; dès le malin il compulse les catalogues à prix marqués ; il analyse les vacations d’une vente future, il prend des notes pour en enrichir ses ouvrages, il consulte ses cartons d’eaux-fortes, ses dossiers d’autographes et se rend au quartier général de