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curieux littéraire plutôt que bibliophile, dans l’acception aujourd’hui tant détournée de ce mot,… un discours de bibliopégiste écrit de ma plume ! Certes l’idée me semblait plaisante et méritait d’être accueillie comme elle le fut, du reste, avec un ahurissement profond et une ironie mal déguisée.

À la seule pensée de mon nom imprimé sur un recueil de cette nature, je voyais déjà mes très chers collègues des Amis des Livres et MM. les grands prêtres de la Bibliophilie transcendante s’égayer sans fin et non sans raison de ma soudaine outrecuidance, et je songeais aux airs de profond dédain des gens du métier, aux moues pitoyables des maîtres ornemanistes, aux haussements d’épaules des petits clans et aux clabauderies des petites boutiques. — Un simple homme de lettres avait-il en effet qualité pour aborder un pareil sujet, vis-à-vis duquel un praticien eût à peine osé se risquer ? — La proposition était donc fallacieuse et je considérais mon éditeur comme un singulier déséquilibré, dont à mon grand regret je ne pouvais flatter la monomanie, lorsqu’en dépit de mon refus formel, il se permit d’insister en ces termes :

« Permettez, me dit-il , Je parle sérieusement et mérite d’être écouté de même. Je ne viens pas réclamer de vous un traité didactique et professionnel sur l’art de la Reliure ; Je ne suis point fabricant d’appareils soporifiques et ne souhaite aucun mal à mon prochain.