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Mais ce sont-là, me dira-t-on, des Bibliomanes dans toute la force du terme ! — Non point, ce sont des figures caractéristiques de bibliophiles à la mode, et nullement mésestimés en ce siècle d’argent ; tous agiotent et tous suivent les fluctuations de la bourse des Livres avec la passion du joueur. Sur cent de ces amateurs, moins spéculatifs que spéculateurs, plus de moitié affirmeront que c’est porter atteinte à la beauté d’un livre que d’y porter un couteau profane ; d’autres prétendront que le livre est un joli bibelot, et que le vrai collectionneur doit être joaillier et regarder ses bijoux sous vitrine sans en faire jouer les agrafes. Ceux-ci, enfin, plus ingénieux, diront que, à l’exemple des collectionneurs de vieilles faïences qui ne dînent pas dans leurs assiettes de vieux Nevers et se garderaient bien de servir le potage dans des soupières de Rouen, à la corne, les véritables amis des livres ne doivent pas lire les auteurs dans de belles éditions. Ceux-là, plus carrés encore, insinueront qu’un véritable amateur ne saurait être un érudit.

Ce sont en effets théories du jour, et les complaisants s’exclament et se pâment. J’accorderai sans indignation que tous ces lions de la bibliophilie ne sont pas absolument des bibliomanes, que ce qualificatif ne convient point à leur dandysme, et qu’il est urgent de leur trouver une autre appellation ; nommons-les donc, si bon vous semble, des Biblioscopes ou con-