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Caïus-Gracchus Picolet, vieil habitué de ses rayons> resté fidèle au docte logis, malgré ses malheurs et malgré les dangers trop évidents de la fréquentation.

Pauvre abbaye de Saint-Germain, illustre et révérée pendant tant de siècles, et qui comptait quatorze cents ans d’existence glorieuse, depuis le jour ou Childebert, fils de Clovis, avec saint Germain, évêque de Paris, jetèrent les premiers fondements du moutier primitif dans les prés fleuris qu’arrose la Seine, au temps où Lutèce commençait a peine à sortir de son île.

Pas plus que Lutèce, le monastère ne sombra point au temps des invasions et des guerres. Les Normands massacrèrent les moines, brûlèrent et renversèrent l’église, l’Abbaye se releva et se repeupla.

Alors commencent les siècles de grande prospérité, l’Abbaye féodale, puissante et dominâtrice, est le centre seigneurial d’une petite ville à part, à côté de Paris ; une enceinte crénelée flanquée de tours et cernée d’un fossé entoure un vaste ensemble d’édifices, de cours et de jardins.

Deux cloîtres, un colossal bâti aient contenant la salle du chapitre, la salle des hôies et d’immenses dortoirs, un réfectoire admirable, une chapelle de la Vierge sont dominés par une église à trois tours majestueuses et par le grand logis du seigneur abbé.

L’Abbaye possède d’immenses domaines, des prieurés et des cures dans Paris et hors Paris, des terres, des fiefs, des censives un peu partout ; elle perçoit des droits et des péages nombreux, exerce haute, basse et moyenne justice sur ses vassaux. Elle a ses gens d’armes et ses sergents, et se défend à l’occasion derrière ses murailles. Elle traverse ainsi, superbe et honorée, les siècles du moyen âge.