Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/97

Cette page n’a pas encore été corrigée

comme leur en demandant des nouvelles, demeura sans parler. Qui fut cause que Silvandre prit la parole, et luy dit : Belle bergere, la fontaine que vous demandez est veritablement en cette contrée ; mais amour est cause qu’il vaudroit autant qu’elle n’y fust point, estant remise en la garde de quelques animaux enchantez, qui en defendent l’accez. – Et où est-elle ? reprit Astrée. – Comment, dit l’Estrangere, vous estes de ce pays et vous ignorez où est une chose si rare ? Cela est presque incroyable, et mesme à ceux qui verront vostre visage, qui estant si beau, ne peut pas avoir esté veu sans amour, ny vous, par consequent, sans curiosité de sçavoir la verité de l’affection de ceux qui vous ayment, qui, à ce que j’ay ouy dire, se void en cette fontaine. – Je sçay bien, dit Astrée, en rougissant un peu, que vostre courtoisie vous fait parler de mon visage si avantageusement, vous semblant d’estre obligée pour les offres que je viens de vous faire, de me gratifier de cette sorte ; et c’est pourquoy je ne vous respondray point à cela. Mais quant à la curiosité que vous croyez qui doive estre en moy, outre que l’occasion n’y est point, parce que je n’ay jamais eu assez de bonheur pour estre aymée de cette façon, encores avons-nous une coustume parmy nous, que jamais nous ne recourons à la fontaine dont vous parlez, pour cognoistre la volonté de ceux qui nous servent, ayant un moyen beaucoup meilleur et plus asseuré. – Et quel est-il, dit