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bon jugement de cette belle Diane ? Veritablement, si je delaisse cette juste cause, la pouvant soustenir avec de si claires raisons, je crains d'estre grandement coulpable. Que ferons-nous donc, ô Silvandre, pour, sans encourir la peine, faire ce que nous devons ? Recourons à cette belle Diane mesme, et avec des supplications, demandons luy en don ce que nous pourrions bien luy dérober. Il est impossible que les prieres, qui sont filles de Tautates, ne soient exaucées par celle qui a tant de perfections, que nous la pouvons estimer divine, s'il y a quelque chose de tel parmy les mortels.

C'est donc à vous, ô ma belle et divine maistresse, à qui j'adresse ces prieres, afin qu'il me soit permis, en declarant la verité de ma victoire, de monstrer l'equité de vostre jugement, protestant qu'en ceste action j'ay plus d'egard à ce qui vous touche, qu'à ce qui est de moy ! Car que me peut importer que Phillis se prevalle de l'avantage que j'ay par dessus elle, puis que cela ne me rend moins homme de bien, ny moins vostre serviteur que je suis ? Mais si par les subtilitez de Phillis on venoit à croire qu'un jugement si peu juste eust esté donné par vous contre toute sorte de raison, ce seroit blesser l'honneur de vostre bel esprit, qui ne s'est jamais trompé en une chose si claire et si recogneue de chacun. Et avec l'asseurance que vostre silence me donne que vous le trouvez bon, je respondray à Phillis de cette sorte :

Est-il possible, bergere,