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va point retardant par l’occasion que j’ay dicte, quelle autre est-ce que, vous et elle, pourrez alleguer pour excuse ? – Je crains, respondit froidement Diane, que nos rustiques discours ne rapportent beaucoup d’importunité à cette assemblée, et mesme à la belle Daphnide et à Alcidon, qui ne trouveront que fort maigres nos petits passe-temps de village, estans accoustumez à des sujects plus hauts et plus relevez.

Et parce qu’elle vouloit continuer en ses excuses : Vous vous trompez, discrete bergere, dit Adamas, Daphnide et Alcidon sont maintenant des bergers de Lignon, puis qu’ils en ont pris l’habit, d’autant qu’ils sçavent bien que la grandeur du personnage que chacun fait, n’est pas ce qui le rend estimable par dessus les autres, mais de se sçavoir bien acquitter de celuy que nous voulons representer. Et par ainsi, nous devons croire que, comme cette belle dame et ce gentil chevalier ont bien sceu faire le personnage de belle dame et de vaillant chevalier, tant qu’ils en ont porté le nom, de mesme, maintenant qu’ils sont revestus des habits de berger et de bergere, ils ne s’en acquitteront pas avec moins de perfection, pliant leur esprit aux douces naifvetez des pasteurs, et à leurs innocens exercices. Et la croyance que j’en ay eu, m’a convié de faire cette proposition à Phillis, afin que par vostre jugement ce nouveau berger et belle bergere apprissent quels sont les entretiens de