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le luy avoit faict souffrir, la pouvoit convier maintenant au contraire, car ç’avoit esté pour faire mieux croire qu’il fust fille ; et cette opinion estant de sorte en l’ame de chacun, elle creut n’estre plus necessaire de souffrir cette contrainte.

Et parce qu’elle demeura quelque temps à songer à toutes ces choses, et que l’humeur d’Hylas n’estoit pas d’avoir tant de patience : Ma maistresse, luy dit-il, ou resolution, ou congé. – Mon serviteur, respondit Alexis, nous qui sommes druides, ne nous hastons pas tant que les autres personnes, car en toutes nos affaires, avant que de les resoudre, nous consultons tousjours l’Oracle. – Et quoy ? ma maistresse, reprit Hylas, vous ne faites rien sans luy en demander congé ? – Chose quelconque, dit-elle. – De sorte, adjousta Hylas, que quand, apres vous avoir servie longues années, ou pour le moins quelques lunes, si pour recompense je vous demande un baiser, il faudra faire un sacrifice pour consulter l’oracle ? – O mon serviteur ! respondit en riant Alexis, nous ne demandons point ce congé à l’oracle, car nous sçavons desja qu’il ne le veut pas. – Comment ? s’escria Hylas, apres un long service, il n’est pas seulement permis d’avoir le baiser d’une main ? – Rien du tout, repliqua la druide. – Et qu’est-ce donc, dit Hylas, que je dois esperer apres vous avoir longuement aymée et servie ? – Le contentement, dit-elle, de m’avoir aymée. – Je ne trouve pas, dit Hylas, que ce plaisir soit si