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ce qui estoit de leurs franchises, lesquelles ne pouvoient estre violées par un prince si juste et craignant les dieux. Mais son amour qui estoit encores plus forte que toutes ces considerations, l’eust sans doute porté contre son devoir, si Arimant, qui s’estoit trouvé à ce spectacle, et qui ne pouvoit presque contenir les larmes de compassion de veoir Cryseide en cette extremité, fendant la presse en despit des gardes, ne se fust jetté entre Cryseide et le roy, et mettant un genouil à terre, ne luy eust dit : Seigneur, je me viens presenter à ta Majesté, asseuré sur ta promesse et sur ton serment, et desquels je te fais voir l’escriture, dit-il, luy monstrant sa declaration qu’il avoit en la main, pour recevoir la grace que tu as promise à celuy qui te dira qui fut cause que ceste genereuse fille (monstrant Cryseide) eschappa de tes gardes. – Estranger, dit le roy, qui estoit tout troublé, je n’ay jamais rien promis que je ne tienne. Declare le coulpable, afin que je le fasse punir, et demande la grace, afin que tu l’obtiennes. – Seigneur, dit alors Arimant, en se relevant, le coulpable est icy en ta presence, et tu pourras aisément le chastier, car c’est moy. – C’est trop, reprit incontinent le roy, et comment as-tu la hardiesse de te presenter devant mes yeux ? – Pour la seule esperance, dit-il, de la grace que je te veux demander, et ne croy point, seigneur, que ce soit, ny ma vie, ny l’amoindrissement de