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pour quelque occasion que l’on ne scavoit point encores. Il revint incontinent vers son maistre, voyant mesme la grande difficulté qu’il avoit de parler à elle, resolu de le persuader de se retirer en Italie, puis qu’il n’y avoit pas apparence que se voyant servie, caressée et honorée d’un si grand roy, l’ambition d’estre royne ne luy fist perdre l’amour d’Arimant.

Estant donc retourné à Vienne, il luy raconte tout ce qu’il avoit appris, et apres luy remet devant les yeux la legereté des femmes, leur ambition, la douce flatterie d’estre royne, et la grande apparence qu’il y avoit qu’elle recevroit l’honneur que le roy luy vouloit faire. Qu’il le conseilloit de ne s’y point amuser d’avantage, et de se souvenir de l’ennuy que son pere auroit de sa perte, et que cela pourrait estre cause de sa mort, et de l’entiere, ruyne de sa maison ; que de sejourner là d’avantage, il n’y avoit point de seureté, parce que ce jeune homme qui les avoit servy de guide, les pourroit deceler et faire reprendre. Bref, que pour toutes raisons, il devoit se promptement retirer en sa maison, cependant qu’il le pouvoit faire.

Arimant escouta Bellaris tant qu’il voulut parler, non pas pour consentir à son opinion, mais parce qu’il avoit l’esprit ailleurs. Et lors qu’il se fut teu : Bellaris, luy respondit-il, je ne m’esloigneray guere de ton advis, pourveu que tu fasses encores ce que je te diray. Retourne incontinent