Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/785

Cette page n’a pas encore été corrigée

parce qu’il creut que sans doute ils iroient à Lyon, ou pour s’embarquer, ou pour prendre le chemin des Helveces. Et parce qu’ils sçavoient, comme personnes du pays, les sentiers plus courts, ils les avoient devancez, et ce soir estoient desja logez dans le mesme logis où Arimant et sa troupe s’alloient reposer.

Le capitaine recogneut incontinent Bellaris, et s’asseurant qu’ils estoient ensemble, il advertit tous ses gens pour le surprendre au mesme qu’il mettroit pied à terre ; mais ils ne le peurent faire si secrettement, que Bellaris, qui marchoit tousjours avec soupçon, ne se prit garde de leurs mouvemens. Et parce qu’il avoit tousjours accoustumé d’aller devant chercher le logis, et puis s’en retournoit querir son maistre, apres avoir parlé à l’hoste, et sceu qu’il y avoit assez de place ; Je m’en vay donc, dit-il, tout haut, faire venir mon maistre et sa troupe. Le capitaine qui estoit dans une chambre voisine, tout prest à se saisir de luy, l’oyant ainsi parler, ne se voulut descouvrir, pensant les prendre tous deux en un coup. Mais le prudent Bellaris revenant vers son maistre : Seigneur, luy dit-il, sauvons-nous, le capitaine nous attend en ce logis.

Arimant fut grandement surpris. Toutesfois, considerant le peu de temps qu’il avoit à prendre party, il fut d’avis que Cryseide et Clarine s’y en allassent loger avec le guide, et trouvassent quelque excuse de leur voyage, et que le lendemain