Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/777

Cette page n’a pas encore été corrigée

que les dieux aident de faveurs inesperées ceux qui esperent en eux, et font leur devoir envers leurs maistres. Et y a-t’il rien à quoy je sois plus obligé qu’à vous servir en tout ce qui me sera possible, et particulierement en une affaire de telle importance ? Mais soit ainsi que la cruauté de ce barbare luy fasse user autrement envers moy qu’il ne devroit, faut-il pour quelque danger qui se presente, que je laisse de vous servir ? Et si je meurs, qu’est-ce autre chose que faire un peu plustost ce qu’en fin il faut que je fasse ? et puis-je finir mes jours pour un plus beau ny pour un plus honorable subject qu’en vous donnant la liberté et le contentement ? Au contraire, si je ne le faisois pas, quelle reproche ne me ferois-je tout le reste de ma vie, d’avoir perdu une si belle occasion de vous tesmoigner ce que je vous suis ? Ne me ravissez point cette gloire, seigneur, je vous supplie, je la vous demande en recompense de tous les services que je vous ay rendus. Et seulement je vous requiers de trois choses : l’une, si je meurs, que vous vous souveniez que vous n’aurez jamais un plus fidelle serviteur ; l’autre, si je vis, que vous me donnerez Clarine pour ma femme ; et la derniere, qu’en toute façon, lors que vous serez sorty d’icy, vous vous retirerez en toute diligence, afin que vous ne soyez pas repris tous deux une seconde fois.

Et continuant son discours, il sceut de telle sorte persuader Arimant qu’il ne peut jamais refuser