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pour luy conserver Cryseide. Et cela sera cause que pour ne manquer à ce que je vous dois à tous deux, j’exposeray librement la vie pour essayer de vous remettre ensemble. Dites-moy, madame, vous tient-on fort resserrées ? – Tu le vois, luy dict Cryseide. – Si l’on vous traitte ailleurs comme icy, reprit-il, vous pouvez aisément vous sauver. – Mais, respondit-elle, encores que je me sauvasse, où pourrois-je aller ? Car de passer les Alpes sans estre reprise, il est impossible. – Ne vous mettez point en peine, dit-il, pourveu que vous puissiez sortir de cette ville, je sçay un lieu où je vous mettray, attendant que je fasse sortir Arimant du lieu où il est, par un moyen que j’ay pensé ; et quand vous serez tous deux ensemble, je m’asseure que les moyens ne manqueront point pour passer en Italie. – O mon amy ! s’escria-t’elle, si tu pouvois faire ce que tu dis, quelle seroit l’obligation que je t’aurois ? J’ay pensé, continua-t’elle, que si tu me fais venir un batteau sur l’Arar, au droit de nos fenestres la nuict, parce qu’elles ne sont guere hautes, j’y pourray descendre pourveu que tu me tendes la main. – Je le feray bien, dit-il, mais comment passerons-nous les chaisnes qui sont tendues au sortir de la ville dans la mesme riviere ? – Mon amy, repliqua-t’elle, Dieu nous aydera, et si tu veux y travailler, je m’asseure que tu en trouveras bien le moyen, car je me souviens d’avoir ouy dire que d’autres s’y sont sauvez. Mais il faut avoir