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doute qu’il n’en fust jamais reschappé, si me trouvant auprès de luy, je n’en eusse eu le soing auquel j’estois obligé. Mais encores que je fusse un peu blessé, toutesfois ne l’estant pas à l’esgal de luy, je feignis d’estre mort, et me laissay cheoir à ses pieds, car il estoit desja par terre. Les ennemis ayant bien d’autres desseins que de despouiller des morts, tout le sac de la ville estant à eux, aussi tost que nous fusmes en terre, la coururent toute et la traitterent comme vous pouvez avoir sceu. Lors que je vis qu’il n’y avoit plus personne autour de nous, je me relevay et banday quelques petites blesseures que j’avois, puis m’en vins vers mon maistre, qu’avec l’aide d’un jeune homme de la ville, je portay dans une escuyerie deshabitée qui estoit là auprès, n’osant me mettre dans des maisons, à cause que tout estoit plein de soldats. J’avois encores opinion qu’il ne fust pas mort, me semblant que les dieux ne permettroient jamais qu’une personne si accomplie qu’Arimant sortist du monde en la fleur de son aage ; je visitay donc les coups qu’il avoit, et quoy que je ne m’y entende guere, toutesfois je n’en voyois point, ce me sembloit, qui fussent mortels. Ne sçachant que faire, car il saignoit tousjours, je rompis ma chemise, en fis des bandes, et prenant de l’araignée, estant en lieu où il n’y en avoit pas faute, je le banday le mieux que je peus, et puis, cherchant de tous costez, je trouvay un peu de vieille paille, sur laquelle je l’estendis, mettant sa teste