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retient ? – Jusques à cette heure, dit-il, madame, j’ay creu que ce qui m’avoit conduit, et qui me retenoit en ce lieu, ce fust ma mauvaise fortune ; mais je dis maintenant que c’est le plus grand heur que je puisse souhaitter ayant l’honneur de vous y voir et de vous y offrir mon service. – Je te remercie, Bellaris, dit-elle, il ne faut point que nous attendions assistance que de Dieu seul, car estant entre les mains du roy Gondebaut, qui veux-tu qui nous en puisse retirer que Dieu ? – Et pourquoy, dit-il, madame, n’essayez-vous de vous mettre à rançon ? Je m’offre de m’en aller à Eporede trouver vos parens, et y faire telle diligence que vous cognoistrez le desir que j’ay de m’acquitter en quelque chose des obligations que je vous ay. – Mon amy, respondit Cryseide, je ne refuse pas cette assistance,mais il faut attendre que le roy soit icy, et lors nous verrons ce qui s’y pourra faire.

Toutes les dames oyant cet homme parler italien, s’assemblerent autour de luy, curieuses de sçavoir quel il estoit. La compagnie de Cryseide l’interrompit pour luy demander d’où il estoit Madame, dit-il, je suis Salassien, eslevé dans la maison de Cryseide, et qui ay tant de souvenir du bien que j’y ay receu, que je, voudrois au peril de la vie la pouvoir servir. J’ay esté amené en ce lieu, non pas prisonnier, mais comme serviteur de Marciante, chevalier assez recogneu dans la mesme province. Il fut pris et tué par