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en toute vostre fortune, puis qu’Arimant est encore parmy les hommes. – J’en dis autant que toy, Clarine, luy dit Cryseide, et tant s’en faut, je remercie les dieux, de tous les travaux qu’ils m’ont voulu donner, puis que je sçay que mon cher Arimant m’ayde à les supporter. – Mais, madame, reprit Clarine, comment avez-vous sceu ce que vous dites ? – Tiens, ma fille, luy respondit-elle en luy presentant le petit livre, voilà le messager des bonnes nouvelles. Clarine alors le prenant, le baisa cent fois, et de pleurs de joye le mouilla, de sorte que Cryseide : Tu me le gasteras de tes larmes, Clarine, dit-elle, et il me semble qu’il le faut mieux conserver.

Et cependant que Clarine le consideroit, et qu’elle alloit remarquant les effaceures, Cryseide luy raconta tout ce qui luy estoit arrivé dans le temple, et comme elle avoit mescogneu Bellaris, que toutesfois elle esperoit de le recevoir le lendemain, quand elle y retourneroit, et qu’en passant il le luy avoit ainsi asseuré. Que si de fortune elle ne pouvoit parler à luy, à cause de ses compagnes et de plusieurs qui ayoient les yeux sur elle, il faut, disoit-elle, Clarine, qu’en toute façon tu t’approches de luy, et apprennes tout ce qui se pourra des nouvelles de mon cher Arimant ; et cependant donne ordre d’avoir une escritoire et du papier afin que je puisse faire response. – Je n’y manqueray point, madame, respondit Clarine, et croyez que ce que je ne sçauray pas, ne sera