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veux conclure par là que les dieux qui n’assemblent jamais les contraires sans quelque lien de sympathie, ne les auroient pas poussez à ceste bonne volonté, qu’elle ne fust desja entre eux.

Je loue, amy, l’eslection de mon fils, car Cryseide merite d’estre aymée, et maintenant que je sçay les raisons pour lesquelles elle a fait ce que je desappreuvois, je l’estime au double de ce que je faisois. Et par ainsi vous direz à mon fils, car je voy bien que c’est luy qui vous a donné charge de m’en parler, que puis que selon son devoir, il m’a porté ce respect de ne point prendre Cryseide sans mon contentement, je luy en sçay si bon gré que, non seulement je l’appreuve et loue, mais en remercie les dieux, et les prie de me donner ce contentement que je les puisse voir bien tost tous deux ensemble. Et encore que je prevois que Rithimer pourroit augmenter la haine qu’il me porte, se figurant que mon fils l’aura offencé, en luy ravissant dans sa maison une parente de sa femme, toutesfois cela ne me fera point changer d’opinion, estant résolu de les maintenir au peril de quoy qui m’en puisse arriver.

Je m’asseure, Hylas, que vous ne douterez point que ceste response ne me donnast le plus grand contentement que j’eusse peu desirer, et jugez-le, puisque me jettant à ses genoux, je le remerciay pour son fils et pour Cryseide, ne m’osant encores declarer, que ce ne fust par l’avis