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qu’autrefois je vous ay apportée. Arimant qui ouyt sa voix, et ne peut entendre ses paroles confuses, voyant les battemens des mains et la joye qu’il faisoit paroistre en ses actions, demeura estonné de ce changement, et lors qu’il fut un peu plus pres de luy : Qu’y a-t’il, et qu’est-ce, luy cria-t’il, que tu me veux ? – Seigneur, s’escria le jeune homme, bonnes nouvelles ! Cryseide n’est point morte, elle vous envoye ce messager. – Cryseide n’est point morte ? reprit-il, tout, hors de soy, est-il bien possible ? – Seigneur, dit l’escuyer, il est certain, et voilà celuy qui vous en apporte des nouvelles. A ce mot, Arimant tournant les yeux et les mains au Ciel : O dieux, continua-t’il, soyez-vous à jamais benis et louez de ceste faveur que vous me faites ! Et à ce mot, celuy que je luy envoyois arriva, et le recognoissant : Seigneur, luy dit-il, Clarine m’a commandé de vous donner cette lettre.

Arimant estoit tellement hors de luy-mesme qu’il la receut la main toute tremblante, et sans sçavoir ce qu’il faisoit. Enfin se souvenant qu’il ne falloit point que ce messager sceust l’affection qu’il me portoit, mais qu’il feignit que ce fut à Clarine, il reprit un peu ses esprits, et luy demanda de ses nouvelles : Seigneur, luy dict-il, elle se porte fort bien, et m’a commandé de vous dire de sa part que Cryseide aussi est en fort bonne santé. – Cryseide ? repliqua-t’il froidement, l’on m’avoit