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creus ne pouvoir rien apprendre d’avantage, je partis à l’heure mesme de la ville, et m’en vins en toute la diligence qu’il m’a esté possible, non pas que je n’eusse beaucoup de regret de vous apporter une si mauvaise nouvelle, mais pour ne point manquer au commandement que vous m’en aviez faict. – O dieux ! s’escria-t’il, alors il n’y a donc plus de doute que Cryseide ne soit morte puis que tu l’as veue de tes yeux propres ? Et comment est-il possible que les dieux ayent consenty à cette cruauté ? Mais comment se peut-il que j’oye ces nouvelles et que je ne meure ? Vous, dieux, vous l’avez permis pour ma punition, et moy je ne meurs point encores pour souffrir plus par le peu de vie qui me reste, que je ne ferois par une prompte mort !

Il vouloit continuer, lors que son pere qui avoit esté adverty de son mal, et qui aymoit ce fils fort tendrement, comme n’ayant enfant que luy, et outre cela estant accomply de tant de perfections, s’en vint heurter à la porte de la chambre ; et parce que ce jeune homme en recogneut la voix, il en advertit Arimant qui, se remettant un peu, et cachant le plus qu’il luy estoit possible sa douleur, fit ouvrir la porte. Les fenestres estoient fermées et les rideaux du lict tirez, de sorte que quand le pere fut dans la chambre, il ne peut rien remarquer au visage d’Arimant ; mais s’approchant de luy, et